Les grands handicaps des bacs

Beaucoup de temps pour franchir un fleuve

Même dans des conditions optimales, le franchissement par bac pouvait prendre plusieurs heures. Cela s’explique certes par la faible fréquence de rotation des bacs, mais aussi par la fréquente absence d’infrastructure, et notamment de quais, qui compliquait fortement l’accès au bac lui-même.

La présence de bras secondaires compliquait sérieusement l’accès, et il n’était pas rare de porter les voyageurs à dos d’homme pour éviter qu’ils ne se mouillent.
A noter aussi que le bac ne fonctionnait que pendant les heures du jour, du lever au coucher du soleil.

Une durée de franchissement aléatoire

La durée de franchissement dépendait de beaucoup de paramètres externes au bac lui-même, notamment de la force et du sens des courants, de la force et du sens des vents.
Il arrivait fréquemment dans les périodes hivernales que les bacs fussent seulement indisponibles : le voyageur devait trouver à se loger pour attendre la remise en service du bac !
Nous avons noté des cas extrêmes sur les franchissements d’estuaires, où selon les courants, ou la violence des vents, la durée de franchissement pouvait se compter en demi-journées ! Il n’était pas rare que le bac dérivât d’un à deux kilomètres en amont ou en aval ! (exemple, Cubzac, La Roche-Bernard).

L’opération était dangereuse pour les voyageurs comme pour les biens

La stabilité du bac, ainsi que sa capacité à faire front aux différents objets dérivant est souvent douteuse. Lors des crues, s’aventurer sur un bac pouvait être très périlleux. Les tarifs étaient alors laissés à la discrétion des passeurs ! A Cubzac, certains transporteurs préféraient dans ces cas, l’acheminement par bateaux qui descendaient la Dordogne jusqu’à son estuaire, puis remontaient la Garonne jusqu’à Bordeaux !

Nous avons un exemple en 1651 à Changeac, où 41 victimes ont été dénombrées lors de l’utilisation d’un bac en période de crue.

Le coût d’exploitation d’un bac était élevé.

Si la mise en place d’un bac était relativement peu onéreuse (voir coût présenté dans le rapport Durance), sa mise en exploitation ne l’était pas.

L’exploitation du bac donnait souvent lieu à un fermage (le bac ou les bacs et l'infrastructure sont mis à sa disposition).

Chaque bac faisait vivre en moyenne 3 à 4 familles (soit une quinzaine de membres) qui avaient en charge :

Bien qu’il fût exceptionnel, le bac de la bastide à Bordeaux pour franchir la Garonne, occupait en 1776, 28 matelots, y.c l’adjudicataire qui en était le chef. Les embarcations utilisées, 2 bateaux plats et 12 gabares appartenaient à la ville.

Pour finir, il n’était pas rare que les crues emportassent bacs et installations associées, nécessitant alors un nouvel investissement de la part du concessionnaire.

Notons que, depuis la loi du 6 Frimaire An VI qui avait transféré les charges et la jouissance de ces dispositifs à l'Etat, celui-ci en avait tiré un revenu de 267 000 francs, mais cette somme était absorbée par les charges de personnel et d'entretien requis spécifiquement pour leur mise en œuvre !