Anne Dangar - Sa vision de la poterie

Il faut tout d'abord rappeler que la poterie, surtout pratiquée de façon artisanale, et donc telle que la pratiquait Anne Dangar, est une discipline qui suppose un grand savoir-faire, et qui, même dans ce cas, ne met pas l'artiste à l'abri d'une défaillance de cuisson. Nombre d'œuvres d'Anne Dangar, n'ont donc pas abouti, et la mise au point du four fut pour elle, source de grande fatigue et frustrations, par les pertes fréquentes de fournées complètes.
Ce choix, elle l'explique ainsi en Avril 1948 :
"Peut-être, j'ai tort d'employer les méthodes du passé. Dans nos fours à flamme vive, on ne peut avoir des pièces sans retouche, sans les accidents de cuisson. Le vent a une influence énorme. Avec les fours électriques, on peut presser un bouton et aller tranquillement au lit et satisfaire les directeurs des Galeries très élégantes avec des vases impeccables. Est-ce qu'il y a une chose vivante qui est impeccable ?"

Anne Dangar - sa technique

Anne Dangar utilise principalement la technique "paysanne" de la poterie en terre vernissée au sulfure de plomb, cuite à la flamme directe. Cette technique est celle, ancestrale, des poteries de la région - Les Chals à Roussillon (38), les Nicholas, potiers à Saint Désirat ou le potier Bert à Roussillon.

La terre utiisée ne donnant pas de blanc agréable, Anne Dangar la recouvre de "Terre de Bresse". dont la qualité permet de dater approximativement les pièces, les plus blancs, les plus purs datant d'avant guerre.

Anne Dangar - son oeuvre

Pour bien comprendre l'œuvre d'Anne Dangar, le mieux est de se référer à ses écrits Avril 1948 :
J'ai choisi de faire des poteries très rustiques - aussi près de la terre que possible. Je ne devais pas les envoyer dans les Villes, ni faire des pièces prétentieuses... Le travail pour les Villes, c'est ce qui est fait avec les terres préparées, très finement broyées - émaillé avec les produits chimiques faits dans les grandes usines, cuit dans les petits fours électriques.

L'œuvre d'Anne Dangar se compose donc principalement de trois approches complémentaires

  • une oeuvre rustique, ses "petits pots", dont elle était particulièrement fière et qui aussi répondait mieux aux besoins des villageois de Sablons et Serrières et qui, aussi, lui apportait les quelques subsides nécessaires pour se chauffer, pour son four ou autres matières premières de son art. Ces poteries étaient décorées très simplement, généralement des motifs "primitifs".
  • une oeuvre plus sophistiquée, pour les galeries principalement.
  • un admirable support pour l'œuvre d'Albert Gleizes : il était assez fréquent qu'elle reprenne, sur son initiative ou celle d'Albert Gleizes, des oeuvres du "maître", qu'elle transposait sur terre cuite. Pour exemple, son courrier en Fev 1948 précise : "Monsieur Gleizes veut que je (fasse) 30 pièces décorées avec ses dessins. Il m'a demandé d'aller aux Méjades pour copier ses gouaches. Je suis restée une semaine ..."

A. Dangar : Plat original

A. Dangar : Soupière

A. Dangar : Support à l'œuvre d'A. Gleizes

A. Dangar : Poterie rustique

Sa signature

Comme la plupart des potiers de Moly, Anne Dangar signait d'une façon très sobre, souvent d'un trigramme composé des initiales M,S puis D ou G, voire D,G ou G,D. Cette signature évolua pourtant, avec plusieurs types coexistant simultanément.

A. Dangar - signature

A. Dangar - signature

A. Dangar - signature

Anne Dangar - expositions

Anne Dangar était très peu motivée par les expositions, et suivant en cela son "maître", n'y consacrait que peu d'efforts. Elle le dit elle-même dans ses écrits en Avril 1958:
"Il y a 18 ans que j'ai tourné le dos aux "galeries très élégantes des grandes Villes, et il (n') y rien qui m'embête plus que d'être obligée de travailler pour ces expositions.. C'est toujours une très grande perte pour moi."

De son vivant, et au prix d'un immense effort, elle exposa ses réalisations notamment à :

  • à Lyon (Rhône), chez Michaud dans la galerie "Styl-Clair" puis "Folklore" dès 1935
  • à Lyon, en 1947, Exposition "Art sacré contemporain" avec Gleizes, Chapelle du Lycée Ampère
  • à Annonay (Ardèche)
  • à Paris en 1948 avec A. Gleizes, à la Galerie des Garets
  • à Avignon en 1948, avec Lucie Deveyle
  • à Saint Etienne (Loire) en 1948
  • à Roussillon (Isère) en Juillet 1949
  • à Vaise (Rhône), au sein d'une exposition d'art religieux (1950)
  • à Aix en Provence en 1951
  • à l'Ecole des Beaux Arts de Paris en 1953 (printemps) avec Gleizes, et quelques autres de ses élèves
  • A Vienne en 1953

Voir aussi les expositions de Moly. Les villageois de Sablons et Serrières furent aussi les spectateurs (souvent) et les clients (parfois) des travaux d'Anne Dangar.

Certaines de ses oeuvres furent acquises par les musées nationaux après 1938 (Musée de Lyon, St Etienne, Annonay, Musée National d'Art Moderne (Paris), Faenza).

Ce n'est que tout récemment que l'œuvre d'Anne Dangar retrouve la lumière des expositions, et il faut noter l'initiative récente des Australiens qui ont ouvert récemment une exposition dédiée à Anne Dangar :

Une exposition a eu lieu en Australie sur Anne Dangar au "National Gallery of Australia" : Anne Dangar at Moly Sabata: Tradition and innovation 13 July – 28 October 2001
A trip to France in 1926 with the Sydney painter, Grace Crowley led to Dangar moving to France in 1930 to take up residence with the artists’ community led by Albert Gleizes at Sablons, situated on the Rhône. She immersed herself in the subsistence lifestyle characteristic of traditional peasant existence, learning to produce glazed terracotta ware in the Gallo-Roman manner. In drawing upon these ancient vernacular ceramic traditions, Dangar produced an innovative model of domestic ware that married these forms with her own experiments in Cubist inspired decoration during the 1930s – 40s.